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CEDEAO-Niger, jusqu’où iront Tinubu et Tchiani ?

Mis à jour le 1 août 2023
Publié le 01/08/2023 à 3:00 , ,

L’un veut faire respecter la décision commune de la CEDEAO, et partant son autorité de président de l’organisation sous-régionale, tandis que l’autre tient à aller jusqu’au bout de son entreprise de mettre en place une transition dans son pays après le coup d’Etat contre le président Mohamed Bazoum. Mais qui du président Bola Tinubu du Nigeria et du général Tchiani du Niger aura le dernier mot ? Vont-ils aller jusqu’à l’affrontement ?

 

La tension monte dans le dossier nigérien. Depuis le dimanche 30 juillet 2023, la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest (CEDEAO) a imposé une batterie de sanctions contre Niamey. Sous l’impulsion du président du Nigeria, Bola Tinubu, l’organisation sous-régionale a décidé de suspendre toutes transactions financières et économiques avec le Niger. Dans le cadre de l’UEMOA, Niamey se voit geler ses avoirs au niveau de la Banque centrale des Etats de l’Afrique de l’ouest (BCEAO). Une menace d’intervention militaire pour un retour à l’ordre constitutionnel n’est pas non plus exclue au-delà de l’ultimatum d’une semaine donnée à la junte. Objectif, contraindre les militaires qui gèrent présentement le Niger à libérer puis à réinstaller dans ses fonctions de chef d’Etat, le président Bazoum.

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À Niamey, l’injonction des chefs d’Etat et de gouvernement ouest africains ne passe pas. Les militaires dirigés par le général Abdourahamane Tchiani n’entendent pas se plier aux décisions de la CEDEAO.

« Nous rappellerons une fois de plus à la CEDEAO ou tout autre aventurier notre ferme détermination à défendre notre patrie », réagit l’armée nigérienne, non sans mettre en garde sur les conséquences qui découleront de toute intervention armée étrangère.

La CEDEAO et le Niger, iront-ils jusqu’à l’affrontement ? Pas évident, estiment des observateurs. Dr Eddie Guipié est enseignant-chercheur en Sciences politiques à l’université Péléforo Gon Coulibaly de Korhogo est de cet avis.

« Les militaires sont des acteurs rationnels et ils savent reconnaître les rapports de forces et s’incliner ou non en fonction. Il s’agit d’un échange. Chacun bande ses muscles pour montrer sa force. Le Niger, ce sont au moins 40 000 soldats. Ce n’est pas la Gambie où la CEDEAO a avait fini par se faire entendre rapidement avant toute action. C’est un Etat qui a des troupes déjà engagées dans la lutte contre le terrorisme. Le Niger est voisin du Mali et du Burkina Faso. On ne voit pas la CEDEAO passer par ces deux pays qui sont l’ouest et le nord-ouest du Niger. Il n’y a que le Nigeria pour pénétrer par la partie méridionale du Niger. Ce qui est une option risquée puisque passer par là, c’est dire qu’il faut dégarnir un front qui lui-même est déjà en flamme. Le Nigeria étant déjà engagé dans une guerre avec le groupe armé terroriste Boko Haram dans le nord-est du Nigeria. Mais l’option d’une intervention militaire est mise sur la table. La CEDEAO est dans une sorte de baroud d’honneur. Il faut arrêter cette spirale, cet effet domino, il faut arrêter cette contagion de coup d’Etat. La CEDEAO joue son va-tout, et il n’est pas à exclure qu’elle puisse procéder par des extrêmes, même si cela signifie, enflammer la région », analyse pour 7info, le politologue ivoirien.

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Mais selon l’universitaire, la CEDEAO va vérifier l’efficacité des mesures économiques qui auront été mises en place avant toute option militaire.

« Le Niger est un pays qui est totalement enclavé. Il dépend de beaucoup de pays de la CEDEAO pour ses exportations et ses importations. Si ces importations et exportations ne peuvent plus passer par ses voisins qui ont accès à la mer par le biais du Golfe de Guinée, ce serait déjà terrible pour le bien du Niger. La question des transactions financières va également jouer. Toutes ces situations économiques inédites devraient suffire à faire plier les militaires du Niger », soutient Dr Eddie Guipié.

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« Si la CEDEAO évalue et qu’elle se rend compte que la junte résiste bien, elle va monter en puissance dans son dispositif en agitant le chiffon rouge de l’opération militaire. Mais cette dernière sera un peu compliquée puisque l’ensemble de ses pays sont déjà engagés dans des conflits. Quels fronts il faudra dégarnir pour aller en créer un autre ? Ce sera à l’appréciation des chefs d’Etat de la CEDEAO qui cherchent à freiner la gangrène de la spirale des coups d’Etat dans l’espace sous-régional », conclut l’universitaire ivoirien.

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