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Guerre en Ukraine et crise alimentaire, faut-il repenser la mondialisation ?

Mis à jour le 15 juin 2022
Publié le 15/06/2022 à 7:59 , ,

L’invasion de l’Ukraine par la Russie risque de provoquer une pénurie de certains produits, tel que le blé dans de nombreuses régions du monde, notamment en Afrique. Le lundi 13 juin 2022, à l’ouverture l’Africa CEO Forum, un sommet économique, à Abidjan, le président ivoirien Alassane Ouattara, s’est dit préoccupé par cette situation non sans remettre en cause la mondialisation. Faut-il donc repenser ce concept ?

 

 

Alassane Ouattara, le chef de l’État ivoirien le pense. Face à plus de 1 500 chefs d’entreprises et décideurs politiques du monde entier réunis à Abidjan, il a fait remarquer sa préoccupation de la situation inflationniste née de la crise ukrainienne. Mieux, il a indiqué que cela pousse aussi à repenser les relations commerciales entre les États du monde.

« Nous sommes préoccupés, c’est le moins que je puisse dire, par le ralentissement de la croissance mondiale et la disponibilité pour l’Afrique de certains produits comme le blé, les engrais et bien sûr par la poussée inflationniste…Une telle situation inflationniste pousse les gouvernements et les entreprises à réévaluer leur indépendance aux réseaux internationaux. C’est réellement une remise en cause de la mondialisation et de la notion du commerce mondial. Cette situation a été accentuée par la crise en Ukraine », a soutenu Alassane Ouattara.

La Russie et l’Ukraine sont deux géants des exportations agricoles au monde. Ces deux pays selon des chiffres commerciaux représentaient respectivement entre 2018 et 2020, 24 % et 10 % des exportations mondiales de blé, 14 % et 13 % d’orge, 2 % et 15 % de maïs, 23 et 50 % d’huile de tournesol. La Russie à elle seule fournit 15 % du marché mondial des engrais azotés et 17 % pour la potasse. Mais de nombreux continents peinent présentement à bénéficier de ces produits. Depuis l’invasion militaire, des embargos sont imposés sur les produits russes, notamment les produits agricoles et pétroliers. Ce qui a un impact sur certains pays.

 

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Au regard des effets de la crise en Ukraine sur l’alimentation mondiale, faut-il revoir la mondialisation et plus spécifiquement les relations commerciales internationales ? Non, cela n’est pas possible, estiment des observateurs. Dr Boyé Roméo, un macro-économiste, modélisateur et chercheur à la cellule d’analyse de politiques économiques du Centre ivoirien de recherche économique et sociale (CIRES) est de cet avis.

« Être dans le commerce signifie qu’on est en interaction avec d’autres parce qu’on veut acquérir ce que nous on ne peut pas produire. En d’autres termes, on n’a pas l’avantage comparatif de produire certains biens. Et pour cela, le voisin ou celui qui est ailleurs produit ce bien à moindre coût alors que si nous-mêmes nous le faisons, cela nous reviendrait plus cher. On préfère donc prendre ailleurs moins cher. Ici il n’y a pas d’autre alternative. Prenons l’exemple du blé. Nous ne pouvons pas en produire sous les tropiques. La Côte d’Ivoire ne peut pas dire comme l’Ukraine est en guerre, elle va produire son propre blé. Quand on parle de remise en cause de la mondialisation, il faut y voir des clauses internationales qui peuvent être fixées pour empêcher l’imposition d’embargo lorsqu’il y a des guerres. Et qu’il faut faire des couloirs pour évacuer des aliments. Car aujourd’hui ce qui entraîne le chaos en réalité est que les États-Unis aient mis les embargos sur les produits russes », analyse pour 7info, l’expert ivoirien.

Comment donc réduire cette dépendance, vis-à-vis de l’extérieur ? Pour Dr Kouamé la solution réside dans la mise sur pied d’une politique d’autosuffisance alimentaire, à travers des stratégies dédiées.

« À court terme, il s’agit d’appliquer les politiques comme les PND et mettre l’accent sur la diversification des produits agricoles, autrement dit, mettre en œuvre la politique d’autosuffisance alimentaire, encourager la jeunesse, inciter les jeunes par des mécanismes de subvention et d’encadrement pour qu’ils puissent s’orienter vers l’agriculture qui permettra au pays d’être indépendant au niveau agricole. Toutefois au niveau des matières premières stratégiques comme le pétrole et le blé, il faut subventionner les prix pratiqués, notamment pour le pétrole qui impacte tous les autres produits », analyse-t-il pour 7info qui l’a joint.

Dr Roméo Boyé, lui suggère le suivi de la démarche du président Macky Sall qui va dans le sens de la négociation. Selon lui, c’est un problème de droit international qui peut régler cela. « Il faut que les États s’accordent sur des règles de sorte que quand il y a des guerres l’économie mondiale puisse tourner étant donné que tout imbriqué », conclut le chercheur.

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