Côte d’Ivoire

Gbonné- Touhé Saïdou, délégué des Burkinabé de Biankouma: « Nous demandons pardon aux Yacouba et Toura »

Mis à jour le 29 mai 2018
Publié le 29/05/2018 à 12:32 , ,

Le délégué consulaire du département de Biankouma, Touhé Saïdou, a dévoilé les causes des conflits qui minent le département. Par ailleurs, il présente les excuses de la communauté Burkinabé au peuple Toura.

Comment vivez-vous avec vos tuteurs Yacouba et Toura dans le département de Biankouma ?

En ma connaissance, nous avons de bons rapports depuis très longtemps. Je suis arrivé à Biankouma en 1999 en provenance de Man. On a de bons rapports en général.

Vous avez de bons rapport, pourtant, tout le monde voit un peu ce qui se passe ici depuis quelques années comme le cas de Gandié. Expliquez-nous ce qui ne va pas exactement.

Je ne sais vraiment pas. Mais, vous savez que nous sommes tous différents. Nous n’avons pas la même intelligence. Chacun vient avec son comportement et le tout mis ensemble, nous devons gérer ça. Je vous avoue que ce n’est pas facile. Des gens font des choses qu’ils croient être bien. Ce sont, souvent, des incompréhensions. Je prends un exemple. Quelqu’un qui vient se chercher et avec ses tuteurs, les bases ne sont pas bien définies. C’est sûr que ces derniers se chamailleront plus tard. Je pense bien que rien ne doit nous opposer et ne nous oppose d’ailleurs. Ce sont les mauvaises explications et interprétations qui sont à la base de tout ce qui arrive. Nous sommes venus nous chercher. Si ici, nous n’étions pas bien à l’aise, on serait parti. Mais un tuteur qui te reçoit, te donne de la place, tu n’as pas à lui faire palabre, quelles que soient les incompréhensions. Comme tout le monde n’a pas le même cœur, il y a d’autres qui réagissent d’une manière violente et ce qui ne devait pas arriver, arrive malheureusement comme à Gandié.

Les autorités administratives et militaires reprochent à votre communauté le refus de répondre aux convocations. Qu’en est-il exactement ?

Ce que je peux dire, peut-être quelques frères refusent de répondre aux convocations des autorités. Certains ont peur d’être arrêtés, quand il y a une situation qui arrive. On délivre une convocation pour entendre les uns et les autres pour une affaire donnée. Les frères ne comprennent pas souvent le bien-fondé d’une convocation. Ils pensent qu’une convocation égale automatiquement à la prison. Donc par peur, ils fuient souvent devant les convocations. En plus de cela, il y a un problème d’éloignement de nos parents. On peut remettre une convocation pour une tierce personne qui se trouve être dans son campement d’où il ne rentre qu’une semaine après. Donc une fois que celui qui a la convocation ne trouve le pas le concerné, il dit systématiquement qu’il refuse, pourtant ce n’est pas vrai. Soit, c’est la peur qui fait qu’on ne répond pas aux convocations, soit c’est l’éloignement des campements qui fait qu’on ne voit pas si tôt celui qui est convoqué.  Sinon, loin de nous l’idée de défier les autorités qui sont placées au-dessus de nous.

Nous voudrons savoir ce que la communauté Burkinabé fait depuis que l’affaire de Gandié est intervenue afin d’apaiser le cœur des uns et des autres?

Depuis le jour du drame, chaque jour que Dieu fait, nous nous battons pour sensibiliser la population Burkinabé. On ne fait qu’appeler les parents qui sont dans les campements au calme. Le mercredi 9 mai quand nos compatriotes ont eu l’information qu’un des nôtres a été tué, nous avons commencé à calmer les gens jusqu’à ce que des individus nous échappent pour aller commettre l’irréparable. Nous ne savons pas jusque-là ceux qui ont fait cela. Mais c’est fort regrettable. Nous avons appelé notre hiérarchie pour leur porter la nouvelle. Nous avons joint tous ceux que nous pouvions joindre. Nous continuons toujours d’amener les uns et les autres à la raison.

Vous avez perdu un être qui ne reviendra plus, le village de Gandié aussi a été complètement détruit. Alors, monsieur le délégué que compte faire votre communauté pour aider le village à se reconstruire ?

C’est dans nos projets. Après les évènements, j’avais voulu avoir une réunion à Gourané avec tous nos compatriotes qui sont dans la zone de Gbonné pour voir ce que nous devons faire. Mais le préfet du département a trouvé que le moment et l’endroit ne s’y prêtaient pas. Nous avons donc reporté cette réunion sur les ordres du gouverneur. C’est vrai, c’est nous qui étions les premières victimes mais on a fini par faire des victimes. On devait donc se réunir pour voir comment on allait apaiser le cœur de nos tuteurs. Mais face à la situation qui était  encore tendue, le préfet a jugé bon d’annuler cette réunion. Et que lui-même allait convoquer une grande réunion à laquelle, toute la communauté Burkinabé du département assistera. Cette réunion est prévue pour le jeudi 1er juin 2018 prochain. Nos responsables consulaires sont informés, de même que l’ambassadeur.  Je pense que d’ici à leur arrivée, on trouvera la formule pour aider nos tuteurs. De manière symbolique nous allons apporter notre aide à la population de Gandié.

Un appel à vos compatriotes et à vos tuteurs pour que la situation dans le département de Biankouma soit beaucoup plus paisible.

Je voudrais en premier lieu demander pardon à la population de Gandié et au peuple Toura dans l’ensemble. Je présente les excuses de toute la communauté Burkinabé à nos tuteurs. Je présente aussi les excuses de nos responsables consulaires à toute la population Yacouba et Toura de Biankouma. Aussi celles de monsieur l’ambassadeur qui suit de près cette histoire.  En leur  nom à tous, je présente les excuses à toute la population Toura et Yacouba.  C’est un acte d’individus égarés. Nous mettrons tout en œuvre pour ne plus connaitre pareille situation ici à Biankouma et même ailleurs où nous sommes reçus pour avoir notre pitance. Je sais que ceux qui ont commis l’acte regrettent dans leur for intérieur. Ils ne sont pas identifiés mais,  ce que je sais, c’est qu’ils regrettent car ils n’avaient mesuré l’ampleur de leurs actes. Aujourd’hui c’est devenu une affaire nationale. Que chacun se ressaisisse. Nous ne devons pas avoir des comportements qui vont nous créer des problèmes.  Nous irons vers nos tuteurs pour présenter nos excuses les plus sincères.

Interview réalisée par  Olivier DAN, Correspondant Ouest

Source : rédaction PôleAfrique.info

 

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