Politique

Réconciliation, après les propos d’Alpha Blondy, des spécialistes souhaitent que les responsabilités soient situées

Mis à jour le 28 octobre 2019
Publié le 28/10/2019 à 6:38 , , , , ,

La question de la réconciliation nationale est sur toutes les lèvres depuis le début des crises à répétition en Côte d’Ivoire. Personnalités politiques, membres de la société civile, artistes musiciens ou simples citoyens ne cessent de donner leur opinion sur le sujet. Et la dernière sortie de l’artiste ivoirien Alpha Blondy, fait réagir les spécialistes.

« (…) La réconciliation en Côte d’Ivoire ne peut pas être un acte posé par un groupe de personnes ou une seule famille politique. Elle doit concerner toute la famille politique ivoirienne dans son ensemble. Pour nous le peuple ivoirien, nous serons heureux de voir qu’ils ont atteint cette maturité…Certains se croient encore étudiants de la FESCI…Aller demander pardon à Gbagbo. Aller demander pardon à Bédié. Et puis on insulte Alassane Ouattara ou bien on est fâché avec Alassane Ouattara. C’est quelle paix ça ? C’est quelle paix, deux poids, deux mesure ? », a tancé le reggaeman ivoirien.

A l’approche des élections présidentielles en Côte d’Ivoire, les ivoiriens craignent une résurgence des violences. De 2010 à 2011, une crise postélectorale dans le pays avait fait plus de 3000 morts selon les organisations internationales. Plusieurs familles ont été endeuillées et certaines plaies restent encore béantes. Parler encore de réconciliation aujourd’hui revêt un caractère particulier. Et les propos d’Alpha Blondy n’ont laissé personne indifférente.

Le politologue Geoffroy Kouao Julien, abonde dans le même sens que l’artiste.

« La réconciliation nationale a aujourd’hui le dos large. Tout le monde parle de réconciliation sans préalablement définir le stade à atteindre pour qu’on parle réconciliation. La réconciliation nationale n’exclut pas la compétition politique, le débat contradictoire, la critique de l’action gouvernementale. Evidemment les injures ne sont pas des critères d’intelligence politiques, donc elles sont à exclure », affirme le juriste écrivain.

De l’avis de l’artiste ivoirien, la classe politique ivoirienne doit éviter l’escalade verbale afin d’amorcer une bonne fois pour toute le chemin de la réconciliation nationale. Toutefois, si pour Alpha Blondy, le pardon doit être accordé à tous, selon le docteur Yao Séraphin, les responsabilités méritent d’être situées avant.

 « La réconciliation nationale concerne tous les ivoiriens. Quand je dis tous les ivoiriens, c’est y compris vous et moi, Ouattara et les autres leaders. Partant de ce constat, il est important que chaque ivoirien demande pardon à son frère. C’est une obligation et c’est un fait qui s’impose à tous car la Côte d’Ivoire continuera d’exister après vous et moi. Ainsi donc, je trouve normal qu’on aille demander pardon à Bédié et à Gbagbo, car ce sont eux les premières victimes de la rébellion de 2002. Guillaume Soro l’a même dit, cette rébellion a servi à Ouattara, et non au deux premiers cités. Dans ce cas, ce n’est pas au Président de la République qu’il faut demander pardon mais plutôt à Bédié et Gbagbo qui ont subi la rébellion. Et c’est là que je ne partage pas vraiment la réaction de la méga star Alpha Blondy » a réagi depuis un pays voisin, le Docteur Yao Séraphin, Enseignant-chercheur en Sciences économiques à l’Université Alassane Ouattara de Bouaké, avant de faire des propositions pour une réconciliation vraie et sincère en Côte d’Ivoire.

« Je pourrais comprendre les propos d’Alpha Blondy, si je prends en compte les raisons qui ont emmené la rébellion. Ouattara a surement essuyé des frustrations. Ce qui l’aurait poussé à agir comme il l’a fait. Cependant pour moi, pour guérir la Côte d’Ivoire, il faut remonter au coup d’Etat de 1999. Trouvons les personnes qui sont à la base de ce coup de force, trouvons aussi celles qui ont financé la rébellion de 2002 et vous verrez que les ivoiriens pourront se regarder droit dans les yeux et se pardonner, comme ce fut le cas en Afrique du Sud après l’Apartheid. Je vous assure que si nous avons des réponses claires à ces différentes questions, nous pouvons nous réconcilier en toute franchise car comme le disait l’ancien procureur de la CPI, Louis Moreno Ocampo, aucun étudiant ne possède assez d’argent pour acheter des kalachnikovs et former une rébellion parlant de Guillaume Soro », a-t-il ajouté.

La réconciliation nationale est donc toujours d’actualité en Côte d’Ivoire. Mais aucune recette proposée jusque-là, n’a permis de la rendre effective.

Éric Coulibaly

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