Société

Le monde rural dans l’angoisse totale face au Covid-19 

Mis à jour le 6 avril 2020
Publié le 06/04/2020 à 12:59 , , , ,

Ce jeudi 2 avril dans la sous-préfecture de Podiagouiné à 19 kilomètres de Sangouiné dans le département de Man, à l’ouest de la Côte d’Ivoire, 7info est à la rencontre du monde rural. A Blolé, village situé à quelques encablures du chef-lieu de sous-préfecture les habitants vivent la peur au ventre. 

<<Cette maladie est une véritable guerre silencieuse. Même dans nos villages, nous avons perdu certaines habitudes. Tout le monde pour le couvre-feu, dort très tôt maintenant à cause des corps habillés qui sillonnent et chicotent  les gens des fois.  Nous sommes au moment du défrichage pour les champs de riz, manioc. En clair le temps de préparer la récolte prochaine. Avant c’est en groupe que nous travaillons dans les champs de riz, cacaoyers, caféiers et partout. Aujourd’hui, nous ne pouvons plus et chacun a peur de son ami. Les travaux de groupe ont cessé. Si cette maladie continue encore plus de deux mois, on risque de se retrouver sans nourriture l’année prochaine. Nos champs de cacaoyers, caféiers  risquent de rester en brousse à cause du manque de main-d’œuvre>>, déplore Tomé Zran, fils de Blolé.

Une jeune fille que nous rencontrons sur le chemin de retour pleure les dégâts causés par le Coronavirus. <<Nous sommes déboussolées. Nous faisons de l’huile rouge. Et souvent, on a recours aux amies pour l’extraction mais vraiment, nous sommes obligées de la faire avec un nombre restreint de femmes à cause de la maladie. Avant, à cette période, ce sont des moments de réjouissance entre nous jeunes filles. Des danses traditionnelles au clair de lune chaque soir pour essuyer la fatigue de la saison champêtre écoulée. Nous sommes obligées de respecter ce que nos dirigeants disent pour éviter la maladie>>, soutient  Fabienne Tia.

 Balo Bi Boué Simplice, est instituteur  dans le village de Podiagouiné, il s’est mué en sensibilisateur pour amener la population à respecter les mesures prises par le CNS. Quant à l’agent de santé, il demande que les moyens leur soient donnés pour être à mesure de répondre aux attentes sanitaires des populations.

 <<Nous avons été coachés à Man pour répondre en cas de besoin face à la maladie à Coronavirus. Nous avons reçu des thermomètres électroniques à infrarouge pour déceler la fièvre chez un patient et orienter au mieux le diagnostic. Nous demandons que la hiérarchie nous donne plus de moyens pour répondre efficacement. Il serait difficile sans moyen de nous approcher des cas suspects. Ici je travaille avec mon thermomètre à infrarouge et je procède à la sensibilisation, à laquelle la population adhère pleinement>>, rassure cet agent de santé rencontré au cours de notre tournée.

Dans les campements, selon un pisteur interrogé devant un magasin d’achat de café cacao, la psychose s’est emparée des planteurs. Au point où malgré le maintien du prix bord champ à 825 Fcfa, l’engouement a considérablement baissé.

<<Dans les campements, les planteurs  sont aussi angoissés. La petite saison entamée, les choses vont au ralenti. Les patrons qui financent ont tous peur d’injecter leur argent actuellement. Les planteurs même n’ont pas trop la tête au travail car chacun a au moins un parent dans nos villes>>, explique Bamba Daouda.

Un tour devant un autre magasin, nous constatons qu’il y a un stock très s important de produits. L’un des responsables nous raconte les difficultés auxquelles ils sont confrontés depuis la fermeture des frontières et les mesures de restriction édictées par les différents États. <<Il est difficile présentement de faire partir nos produits des différents ports. Les sacs de cacao sont stockés ici dans le magasin et nous attendons que les choses s’améliorent pour reprendre nos activités. Pour le moment, malgré l’ouverture de la petite campagne, personne n’est prêt à sortir de l’argent. Nous ne connaissons pas pour le moment, l’issue de cette pandémie, nous attendons tout en confiant notre sort à Dieu>>, fait savoir Hilaire Bleu.

Sur le marché de Man où nous avons, aussi, pris le pouls de la situation, le constat est amer. Les femmes  se  plaignent de la cherté du transport.

 <<Pour aller chercher les bagages dans les villages et campements, c’est dur.  Les chauffeurs nous taxent avec presque le double de ce que nous payons habituellement. Si la maladie continue d’ici à plus d’un mois, ce sera la catastrophe. Vivement que les uns et les autres respectent les mesures gouvernementales pour que cette pandémie nous lâche>>, souhaite une jeune dame, vendeuse de vivriers. Du côté des transporteurs que nous avons essayé de rencontrer, personne n’a voulu nous répondre.

Il faut le dire tout net le monde rural vit la psychose imposée par la maladie à Coronavirus.

Olivier Dan Correspondant Ouest

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