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France – Gilets Jaunes. Des clés pour comprendre le bras de fer

Mis à jour le 26 novembre 2018
Publié le 22/11/2018 à 1:33 ,

Gilets jaunes. Six jours après le début de la mobilisation des « gilets jaunes », mouvement citoyen apolitique qui dénonce la hausse du prix des carburants, Poleafrique.info fait le point.

• Pourquoi cette mobilisation ?

C’est l’inhérent combat depuis le début du quinquennat d’Emmanuel Macron : Paris contre la province, la ville contre la ruralité. Les décideurs et les puissants opposés à ceux, qui partout dans le reste de la France, subissent des politiques qu’ils considèrent comme injustes et inégales. Dernière mesure en date qui fait polémique; la hausse des prix des carburants à la pompe à compter du 1er janvier 2019. Une politique inique qui pénaliserait, selon eux, ceux qui sont obligés d’utiliser leur voiture quotidiennement pour aller travailler, ou tout simplement pour se déplacer car loin des centre-villes.

Depuis plus d’un an, il est vrai que les prix des carburants à la pompe se sont envolés en France. De mai 2017 à octobre 2018, le prix de l’essence a augmenté de 19 centimes par litre, et le gazole (diesel) 31 centimes par litre. Sur cette même période, il est aussi vrai que les taxes ont augmenté. Plus 6 centimes pour l’essence, plus 11 centimes pour le diesel. Et ce n’est donc pas fini. En 2019, le diesel augmentera de 6,5 centimes à la pompe, et l’essence de 2,9 centimes. Mais avant tout, il faut rappeler que la principale cause de la hausse est un corollaire à l’augmentation du prix du baril de pétrole. En octobre 2018, le cours de l’or noir atteint son plus haut point depuis 2014.

Ce que reprochent les gilets jaunes au gouvernement, c’est d’opérer un jeu de yoyo. Suppression de la taxe d’habitation, par exemple, d’un côté pour libérer du pouvoir d’achat, et élévation des taxes sur l’essence et le diesel, qui se répercutent sur les prix à la pompe de l’autre. En majorité, ces gens sont obligés de prendre leurs voitures pour se déplacer, dans des zones rurales ou à distance des agglomérations, où les transports en communs sont peu développés, ou en mauvais état.

• À quoi servent ces taxes ?

À l’Élysée, on justifie ces hausses de prix, qui passent par le rajout et l’augmentation de taxes, par des enjeux environnementaux : lutte contre le réchauffement climatique et combat contre la pollution de l’air. La principale taxe sur l’essence et le fioul, la Taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE), représente en 2018 environ 34 milliards d’euros. Mais les gilets jaunes se sentent toujours trahis par le gouvernement. En effet, ce qui fait débat, c’est que seulement 20% des recettes de la TICPE sont redirigées directement à la transition écologique. Cela représente environ 8 milliards d’euros. Les 26 milliards restant, sont partagés équitablement entre l’État et les collectivités territoriales. Cela fait dire à certains que l’État fait les poches aux contribuables, en faisant passer cela pour une lutte environnementale. Évidemment, la réalité est plus complexe. L’argent restant sert à financer d’autres politiques et infrastructures allant dans le sens de la transition.

• Où en est la mobilisation ?

Les gilets jaunes opèrent par blocages. À la fin du premier jour, samedi 17 novembre, le ministère de l’Intérieur décomptait 2 000 rassemblements et 285 000 manifestants. Des débordements sont signalés : 227 blessés, 7 graves. Le plus tragique s’étant déroulé en Savoie, où une femme est décédée, renversée par une automobiliste paniquée. Des interpellations et des gardes à vue ont été rapportées. À Paris, après avoir bloqué brièvement les Champs-Élysées, quelques manifestants ont réussi à s’approcher de l’Élysée scandant « Macron, démission ! ». Lundi, au troisième jour, ils étaient 20 000 à bloquer autoroutes, rond-points et dépôts de carburants. Des affrontements avec les forces de l’ordre ont eu lieu lorsque ces derniers tentaient de débloquer les axes. Les rixes les plus violentes se sont déroulées à La Réunion. La nuit, les gilets jaunes laissent place à « des bandes de jeunes qui n’ont rien à voir avec le mouvement. Leur objectif c’est l’affrontement, piller, détruire » selon le porte-parole du gouvernement Benjamin Griveaux. Bilan sur place : 109 interpellations, 30 blessés chez les forces de l’ordre. Aujourd’hui encore les blocages continuent. Les Gilets jaunes prévoient une autre forte journée de mobilisation samedi prochain, et seront à Paris.

• Que dit le gouvernement ?

Malgré la forte mobilisation des « Gilets jaunes » du 17 novembre, François de Rugy, ministre de la Transition écologique a affirmé samedi soir que « la trajectoire prévue serait maintenue ». Un jour plus tard, Le Premier ministre Édouard Philippe assure avoir entendu la « colère et la souffrance » après la mobilisation des « Gilets jaunes » contre la hausse de la taxe carbone. Il a cependant de nouveau affiché les engagements du président. En visite officielle en Belgique mardi, Emmanuel Macron a estimé que « c’est par le dialogue » qu’il ferait face aux Gilets jaunes. Il a maintenu que sa stratégie était à la fois de taxer davantage les énergies fossiles et d’accompagner les plus modestes. Du côté de l’Intérieur, Christophe Castaner promet de la fermeté face aux débordements.

• À qui profite ce mouvement, Qu’en fait l’opposition ?

Ce mouvement se caractérise par sa non-appartenance à quelconque parti politique. Il ne né ni ne mourra au sein d’une formation partisane.

Toutefois, les partis d’opposition, qui se dédouanent de toute récupération politique, sont sur le terrain. On aura donc vu à Paris Jean-Luc Mélenchon (La France Insoumise) arborant son gilet jaune sur le Pont de la Concorde. On a aussi vu dans une station service de sa ville de Yerres, Essonne, Nicolas Dupont-Aignan (Debout la France). Laurent Wauquiez (Les Républicains) et Louis Alliot (Rassemblement National) étaient tout autant concernés. On aura même vu le député Jean Lassalle sied son gilet en plein hémicycle. Du côté des syndicats, Laurent Berger, a appelé samedi soir Emmanuel Macron à « réunir très rapidement syndicats, patronat et associations pour construire un pacte social de la conversion écologique ». Une main-tendue que De Rugy dit accepter aujourd’hui.

Presque une semaine après le début des manifestations, les gilets jaunes ne se découragent pas et veulent, par l’action se faire entendre. Mais plus encore; se faire comprendre. Car c’est ce qu’ils reprochent au gouvernement : ne pas comprendre cette France « d’en bas », pauvre, perdant du pouvoir d’achat et qui se « débrouille pour survivre » selon les mots de certains.

Victor Merat, stagiaire
Poleafrique.info

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