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Entretien – Dr Modibo Soumaré, opposant malien: « On ne peut pas continuer d’exercer le pouvoir sans mandat ».

Mis à jour le 21 février 2022
Publié le 19/02/2022 à 9:00 , ,
Dr Modibo Soumaré est le président du Cadre des partis et regroupements de partis politiques pour une transition réussie au Mali. Dans cet entretien, il invite la junte militaire à respecter la charte de la transition qui a fixé à 18 mois, la durée au pouvoir de l’armée.

Le Cadre d’échange des partis et regroupements politiques pour une transition réussie a annoncé qu’il ne reconnaîtra plus les autorités de la transition après le 25 mars 2022. Pourquoi et qu’est-ce qui motive cette prise de position ?

Le Cadre a décidé de respecter la charte de la transition. Et il se trouve que la charte de la transition fixe la transition à 18 mois. Le président et le vice-président avaient prêté serment sur cette base. Et cela a été confirmé. Nous ne faisons que rappeler ce que les textes disent puisque nous avons constaté qu’il n’y a pas d’élection. Nous avons ensuite souligné qu’on tombera dans un vide juridique à partir du 25 mars 2022. Avant que cela n’arrive, il nous faut trouver des solutions pour qu’on évite de se retrouver dans cette situation qui sera inédite. Et qu’ensemble, on puisse trouver les voies et moyens pour mettre sur pied une solution à un Conseil national de la Transition conséquent et tous les organes de la transition pour qu’on ait une transition neutre après le 25 mars. Voilà le sens de notre démarche et nous allons travailler à cela parce que le pays nous appartient tous. Il n’est donc pas question de laisser le chaos s’installer.

Le gouvernement conduit par le Premier ministre Choguel Maïga n’est pas celui qui a fait cette promesse d’organiser des élections aux dates que vous indiquez, puisqu’il y a eu entre temps un autre coup d’État. Est-ce que votre coalition ne fait pas d’amalgame ?

Nous ne faisons aucun amalgame. Nous sommes clairs, nous regardons les textes. On les lit et on informe l’opinion nationale et le peuple malien. Pour nous, il faut rapidement trouver les voies et moyens pour qu’on puisse sortir de cette situation qui n’est pas sans conséquence. Nous ne sommes pas responsables de la gestion du début de la transition et on ne saurait faire d’amalgame au respect de ce délai.

Le gouvernement Choguel est celui qui est passé devant le CNT pour confirmer le chronogramme électoral et son programme d’action gouvernemental a été adopté sur la base de ce chronogramme. D’ailleurs, vous avez pour preuve qu’après le 25 décembre 2021, ils se sont précipités pour dire qu’ils vont prendre des décisions pour qu’on puisse trouver des solutions. Donc on ne peut dire que le gouvernement Choguel est en dehors de ça. Un gouvernement n’est rien à côté d’une charte. Une charte en réalité est un texte qui complète la Constitution du Mali. Il faut que les choses soient claires, les membres du CNT ont donné leur engagement sur la base de ce chronogramme.

Vous parlez d’une transition qui dure depuis un an et demi et pourtant, le gouvernement du Premier ministre Choguel Maïga à moins d’un an d’existence. Avez-vous des antécédents avec l’actuel chef du gouvernement ?

Il ne faut pas personnaliser le débat. Choguel est un intellectuel malien, fils du pays. Nos propositions ne sont pas focalisées sur une personne. Nous avons fait des annonces et c’est dans ces annonces que les discussions vont être menées. Donc on préfère parler des institutions que de personnes. Parce qu’après les choses pourraient être mal interprétées. Nous avons des rapports cordiaux avec son parti.

C’est avant tout un jeu démocratique. C’est la règle de la dialectique. Mais souvent, on personnalise le débat. Nous, nous parlons du gouvernement du Mali. Et ce n’est pas le gouvernement de X ou Y. Choguel ne s’appartient pas, il appartient au Mali. Il est le Premier ministre de ceux qui le soutiennent et de ceux qui ne le soutiennent pas. C’est ainsi que nous voyons les choses.

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Le colonel Assimi Goïta exerce le pouvoir et il n’a nullement l’intention de partir au lendemain du 25 mars 2022.

Je crois que les choses sont claires. Si un mandat finit, qu’est-ce qui se passe ? Il y a un vide. Pour nous, il s’agit de combler ce vide. Mais avant qu’on en arrive là, nous avons écrit au président de la transition que nous souhaitons rencontrer et faire nos propositions de sortie de crise. Cela veut dire que le fil du dialogue demeure. Mais force est de constater qu’on ne peut continuer d’exercer le pouvoir indéfiniment sans mandat.

Est-ce que cette confrontation, qui s’annonce avec les militaires, ne va pas être source de tension dans le pays ?

Il n’y aura aucune confrontation avec les militaires qui sont au service du peuple. Il y a les autorités de la transition et les militaires. Et nous faisons la différence entre les militaires et les organes de la transition. Nous voulons rencontrer les responsables de la transition et leur proposer des solutions pour abréger la souffrance de la population qui est sous embargo depuis plus d’un mois. Il faut absolument que le gouvernement propose un chronogramme. Car nous ne pouvons pas continuer ainsi. C’est une question qu’il faut résoudre rapidement pour que le peuple malien ne soit l’otage d’aucune politique maximaliste de la part d’un gouvernement. Ce que nous suggérons, c’est de renouer le dialogue, de travailler à faire de propositions communes pour qu’on puisse sortir de cette situation.

Entretien réalisé par Arnaud Houssou 

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