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Reportage- Gare routière internationale d’Abidjan, Des herbes à la place des cars, menus travaux en cours, Alassane Ouattara trompé?

Mis à jour le 3 janvier 2019
Publié le 28/03/2017 à 5:53

2017 était le délai de fin des travaux. Mais elle est devenue l’année de début. Un retard que nous avons voulu comprendre.
Les travaux de construction de la nouvelle gare moderne interurbaine et internationale d’Abidjan ne sont toujours pas effectifs. A quand le démarrage des travaux ? Seules les herbes pourraient éventuellement répondre à cette préoccupation.
Le jeudi 25 juillet 2013, le Président Alassane Ouattara posait la première pierre de ce qui était sensé être la gare internationale de la ville d’Abidjan.
Depuis lors, là où les artisans ferrailleurs faisaient du bruit, c’est le silence total.
Lancés en 2015 par l’ancien Ministre des transports, Gaoussou Touré,  les travaux de construction de la nouvelle gare routière internationale qui devaient prendre fin deux ans plus tard, c’est -à-dire en 2017 n’ont jamais connu de démarrage effectif.
Le site aménagé pour la nouvelle gare moderne interurbaine et internationale d’Abidjan situé sur l’espace de l’ancienne casse d’Adjamé reste désert. Aucun bâtiment n’est encore sorti de terre, comme l’a constaté l’équipe de polikafrique.info, jeudi 24 mars 2017.
Tout le long de la clôture du site, quelques commerçants et ferrailleurs déguerpis se sont réinstallés, la nature ayant horreur du vide. Ils vendent leurs articles sur des tables de fortune. Le site est désormais envahi par la broussaille. Néanmoins, on a pu voir un  tas de sable, de gravier et une machine 29. Deux vigiles, chargés de la sécurité du lieu et deux autres  hommes assis sur un banc devisent. Approchés, ces jeunes hommes nous confirment qu’effectivement les travaux n’ont pas encore commencé sur le grand site, mais de l’autre côté (un autre espace en face du site, le site relais), le terrassement a débuté. En chemin pour vérifier les dires de nos interlocuteurs, les deux hommes qui étaient avec les vigiles nous interpellent et déclinent leurs identités. Ils disent être des ouvriers. « Nous sommes des ouvriers, c’est nous qui avons décapé les herbes, sinon elles étaient plus denses. On doit creuser maintenant, cependant, on ne sait pas pourquoi les travaux traînent. Mais, il se peut que d’ici quelques semaines, on installe les bureaux du chantier  », révèlent-ils.
Arrivées sur le site en question, deux machines sont à l’œuvre. Elles terrassent le site. Une dizaine d’ouvriers, des vigiles, le chef technique de l’entreprise, Apex béton, Hassan Bourgie et le représentant contrôleur Bsic, Niava N’Guessan sont sur le terrain.
A en croire le chef technique de l’entreprise, Apex béton, Hassan Bourgie, les travaux sur le site à relais de la gare routière ont démarré depuis le 20 février 2017. « Ce site est la base vie de la nouvelle gare. Aujourd’hui, nous sommes en train de faire le bétonnage et nous  préparons les différentes plateformes pour installer une centrale à béton », explique Hassan Bourgie.
Pourquoi les travaux tardent ?  Le contrôleur général de la société BSIC, Niava N’Guessan, partenaire du ministère des transports, répond que  ce retard est dû à l’installation des réseaux électriques et d’eau  sur le grand site. « Sur le grand site, il y a des réseaux de la Sodeci et de la CIE qui sont dans le sol qui doivent être enlevés, pour qu’on puisse commencer à travailler. Ce sont donc ces réseaux qui font traîner les travaux, tant que ces réseaux ne seront pas retirés, on ne peut débuter les travaux au niveau du grand site. C’est le seul souci qui bloque les travaux », confie Niava N’Guessan. Non sans préciser que « la Sodeci et la CIE ont été déjà avisées du problème ». « Avisées »…. l’expression tempère brutalement l’optimisme communicatif du dénommé N’Guessan.
Politikafrique.info attend toujours la réponse du ministère des transports. Le Directeur général du transport terrestre et de la circulation en charge du dossier de la construction de la nouvelle gare routière est en mission hors du pays. Il sera présent probablement mercredi prochain, informe le service communication du ministère.
Préfinancée par une entreprise de droit privé ivoirien intervenant dans le domaine des BTP baptisée la Générale d’Afrique-CI SA, une entreprise filiale du holding français dénommé Dennis, la nouvelle infrastructure routière internationale d’Abidjan va coûter 4,7 milliards de francs CFA.

Les transporteurs et chauffeurs approchés par Politikafrique.info ont différemment réagi sur le sujet.

Sanogo Lamissa,  chauffeur de minicar appelé communément « gbaka », estime que « les travaux ont mis trop de temps, vu les opportunités que la nouvelle gare va procurer aux transporteurs que nous sommes, car elle va aider à désengorger. Nous demandons donc  à l’Etat de mettre tout en œuvre pour  construire cette gare tant attendue » souhaite-t-il.

Koné Oumar, chauffeur de « gbaka », indique que « Avec toutes les commodités que cette gare va offrir, nous sommes impatients de la voir, elle donnera fière allure à la commune. On espère que l’Etat va respecter sa parole. »

Diaby Ibrahim, du Haut conseil des transporteurs a refusé de se prononcer sur le sujet. Proche de l’ex-ministre Gaoussou Touré, il a choisi de rouler en mode silence. « Nous n’avons pas de communication à faire sur ce sujet » a-t-il répondu à Politikafrique.info.

Retrouvé dans son bureau situé sur le site du « gbèba », insalubre espace qui regroupe les gares routières derrière le site de STIF Renault, à Adjamé, Touré Adama, président de la coordination nationale des gares routières de Côte d’Ivoire a dépeint le moral des transporteurs. « Effectivement, nous avons applaudi lors de la pose de la première pierre de cette gare routière internationale par le chef de l’Etat, il y a bientôt trois ans de cela. On nous avait dit qu’au maximum en 36 mois  la gare devait être livrée. Mais, aujourd’hui, nous assistons impuissants  au non démarrage des travaux » a-t-il fait savoir d’entrée de jeu.  Il soutient que le système de gestion de la première gare routière moderne à Abidjan, à laquelle ressemblerait celle d’Adjamé, n’a pas bénéficié de l’adhésion des transporteurs à cause du désaccord avec la mairie et l’opérateur privé. « Nous nous sommes rendus compte encore qu’avec la nouvelle gare, c’était le même système. Nous avons dit que 42 milliards FCFA de l’opérateur ne pouvaient être remboursés par les transporteurs que nous sommes dans le laps de temps prévu » fait-il savoir. Touré Adama révèle que « L’opérateur du projet de la gare internationale,après la pose de la première pierre et prenant connaissance des problèmes de la gare de PK 18, a eu peur et s’est retiré, mais il n’y a pas eu de communication par le ministre des transports d’alors, jusqu’au nouveau ministre. A ce jour, nous ne sommes pas sûrs qu’il y ait un opérateur. Nous avons adhéré au projet de la gare routière internationale, mais nous n’avons pas adhéré à l’acquisition du marché à un opérateur privé. Ce que nous avons proposé, c’est que l’Etat construise et permette aux transporteurs de faire la location. Dès l’instant que nous avons décrié cela, on ne nous a même pas associé à la cérémonie de la pose de la première pierre.
Aujourd’hui, tout le monde nous donne raison. Ça coûterait combien à l’Etat de nous faire des sorties de route ici, nous permettre d’avoir
des gares goudronnées et un commissariat quand on sait que nous  payons  pas moins de 300 milliards F cfa dans les caisses de l’Etat chaque année. L’Etat peut quand même faire un effort pour assainir le secteur, mais non l’Etat a envie de faire du business sur le dos des transporteurs. Nous sommes abandonnés à notre propre sort, on veut nous faire passer pour un secteur informel, le transport n’est pas un secteur informel, car nous payons les impôts. La nouvelle gare est donc un fiasco, l’Etat doit communiquer sur le sujet. On n’est pas contre le projet, mais nous ne sommes pas d’accord que le projet soit piloté par un opérateur privé qui viendra nous appauvrir.Nous espérons que le nouveau ministre ne va pas continuer à travailler en vase close,  nous sommes ouverts » a indiqué Touré Adama de la CNGRCI.

La nouvelle gare routière internationale d’Abidjan a pour  objectifs, entre autres, de regrouper dans un environnement sain et durable, toutes les activités liées au transport interurbain, de permettre la décongestion de la circulation urbaine au centre d’Adjamé, ainsi que de contribuer à la modernisation du système de transport routier en Côte d’Ivoire.
Gnoungo Fanta
Source : politikafrique.info

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