Analyses

La France nous parle une fois de plus / Par Adam’s Régis SOUAGA

Mis à jour le 10 septembre 2018
Publié le 10/09/2018 à 8:10

Les récents développements de l’actualité nationale marquée par la manifestation des jeunes d’Adjamé-Village soutenus par la chefferie traditionnelle qui condamnent la volonté du gouvernement de détruire, selon eux, le village dans le cadre de la construction du 4è pont Yopougon-Adjamé-Plateau, ont occulté un fait marquant. Le fait s’est déroulé en France, au cœur du pouvoir et du gouvernement d’Emmanuel Macron.

Ainsi, la France a un nouveau ministre des Sports, Roxana Maracineanu, née en 1975 en Roumanie et arrivée en France, à Mulhouse, en 1984, avec ses parents. Première française championne du monde de natation en 1998, Roxana Maracineanu remplace Laura Flessel au poste ministériel.

D’origine roumaine, française d’adoption, elle est depuis le mardi 5 septembre dernier, Ministre des Sports de la France. Laquelle France a son équipe nationale, composée de jeunes gens issus de la diversité africaine et qui a remporté la Coupe du Monde organisée en Russie cette année.

Cette grande France qui n’a que faire du sectarisme, du repli identitaire, de l’extrême droite, qui refuse la xénophobie, nous a une fois de plus adressé un message. Nous, les Ivoiriens, devenus depuis quelques années, frileux devant le non national, distribuant à tout vent, la nationalité étrangère à celui dont la tête ne passe pas.

La France que nous détestons et injurions à longueur de journée car « elle nous a imposé Alassane Ouattara, un étranger, un Burkinabè » selon le pamphlet des pro-Gbagbo et de quelques militants du PDCI-RDA qui n’osent pas élevés trop haut la voix, a sa nationalité fièrement portée par ceux qui la souillent du crachat puant du panafricanisme débridé et sans repère.

C’est donc cette France qui a son Chef de l’Etat qui a choisi une française d’adoption dans un gouvernement. Ce n’est pas nouveau dans tous les cas. Félix Houphouët-Boigny a été Ministre sous De Gaulle. Mais, pour les besoins de la cause, on refait l’Histoire. Comme des pilleurs de tombeaux, on choisit ce qui nous intéresse de cette histoire pour faire du rejet de l’étranger, une politique, la source de nos errements, de notre égarement collectif face au vrai défi : celui du développement.

A San Pedro, les partisans du maire sortant Nabo Clément estime qu’Anoblé Félix n’a pas le droit de briguer un poste électif car étant « étranger ». A Bédiala, une grande marche a eu lieu pour dénoncer la candidature de deux fils qui ont le malheur de ne pas autochtones.

Au final, que recherchons-nous ? La réponse nous vient d’Aboisso où deux cadres de différents partis, PDCI et RDR, Dr Aka Aouélé et Marcel Amon Tanoh, Ministre des Affaires Etrangères, apportent au développement à leur région. N’est pas cela l’essentiel ?

A côté, la décision récente du président Emmanuel Macron, de nommer au gouvernement une personne « réellement » d’origine étrangère et aussi « réellement » française, n’a aucunement soulevé de contestation même de la part de l’extrême droite française conduite par Marine Lepen. L’essentiel, attendu par les français est la relance de la politique gouvernementale du Sport autour de la question des suppressions de postes.

Chez nous, en Côte d’Ivoire, pays sous-développé en dépit de toute la pommade que nous passons sur nos plaies béantes, quel est cet essentiel, ce défi qui rassemble l’ensemble de la communauté ? Quand un fait, l’autre sabote.

Autre nouvelle, la candidature probable, celle de Manuel Valls à la mairie de Barcelone pour le compte de Cuidadanos. Né à Barcelone et naturalisé français, lui aussi a assumé les plus hautes fonctions politiques dans son pays d’adoption, puisque il en a été le Premier Ministre. Il a été jugé sur son bilan et non son origine.

La Côte d’Ivoire qui se cherche sur le chemin tortueux de la construction de la Nation devrait s’inspirer de cette « faiblesse » française et américaine. Barack Obama a été Président des Etats-Unis. Aucune ville US n’a changé d’emplacement. Il est toujours jugé sur son bilan à la Maison Blanche et non sur la couleur de sa peau. Au Kenya d’où il est pourtant originaire, il est vu comme un américain.

Il faudrait, au moment où les centres d’intérêt se déplacent vers la récupération des compétences pour relever tous les défis du développement dans les pays développés, sortir de nos petites peurs alimentées par de vils politiciens en manque de programme et de projet pour épouser l’air du temps. Celui des compétences et du respect de l’institution judiciaire, seule habilitée à délivrer le certificat de nationalité à tout citoyen.

Par Adam’s Régis SOUAGA

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