Politique

Guillaume Soro prévient Marcel Amon-Tanoh contre ce qui l’attend

Mis à jour le 23 mars 2020
Publié le 23/03/2020 à 4:39 , , ,

Dans une très longue lettre publiée ce lundi 23 mars sur les réseaux sociaux, Guillaume Soro l’ex-président démissionnaire de l’Assemblée nationale en exil, écrit à Marcel Amon-Tanoh qui a également rendu sa démission il y quelques jours du ministère des Affaires étrangères de Côte d’Ivoire. Il y évoque les actions qu’il a menées avec l’ex-chef de la diplomatie en faveur du président Alassane Ouattara, ainsi que l’état d’esprit actuel qu’ils ont en commun.

 « Cette lettre ouverte n’a pas pour objectif un calcul politique », rassure Guillaume Soro. Mais pour l’ex-président démissionnaire de l’Assemblée nationale aujourd’hui en exil, il s’agit d’un hommage à un homme loyal dont l’annonce de la démission a suscité en lui un devoir de témoignage. « Au moment où tu rends ta démission du gouvernement ivoirien, je n’ai pu en ce 19 mars 2020, résister à l’irrépressible tentation de rendre témoignage de ta loyauté et de ta fidélité envers Monsieur Alassane Ouattara ».

Marcel Amon-Tanoh et lui, dit-il, ont une amitié de longue date qui prend son socle en 2000. Ensemble dans la complicité et pour le compte de l’actuel chef d’Etat ivoirien alors opposant, Guillaume Soro révèle qu’ils ont traversé des épreuves souvent au péril de leurs vies, fait face à l’adversité et aux critiques de leur entourage respectif.

« Toi tu étais déjà un fidèle compagnon de l’actuel président Ouattara, dont tu étais le directeur de cabinet. Moi je venais de rejoindre sa cause en dépit des mises en garde et des reproches de mes camarades de la gauche politique ivoirienne, eux qui ne comprenaient pas que j’aille soutenir le persécuteur des étudiants de 1991 et le bourreau des libertés civiques et politiques en Côte d’Ivoire. Celui-là même qui, le 18 février 1992, avait emprisonné les leaders politiques tels que Laurent GBAGBO, Simone GBAGBO, Martial Ahipeaud, René Dégni-Ségui éminent professeur de droit. Ainsi Alassane Ouattara était traité de réactionnaire de droite. Je me rappelle aussi les railleries et les moqueries que tu subissais de la part des grandes familles PDCI qui ne comprenaient pas que toi, le fils bon teint d’un baron du PDCI, tu ailles soutenir ce dernier quand le débat sur sa nationalité faisait rage. Et alors tu me disais : « Guillaume, je connais Ouattara. C’est un homme d’honneur et de parole. Jamais il ne nous fera regretter notre choix. Je le connais, c’est un homme de grande valeur ! Il transformera la Côte d’Ivoire pour le bonheur des ivoiriens ». Et moi je buvais tes mots. Je croyais en ce que tu me disais », se souvient Soro.

Cependant dans sa lettre, l’ex-patron de l’Assemblée nationale interroge son aîné. « A la date d’aujourd’hui, penses-tu que nous nous sommes trompés ? », demande-il. Pour lui, il ne fait aucun doute, le changement est manifeste. « Moi je suis perplexe et désorienté tant la métamorphose de l’homme est presqu’irrationnelle ! Mais je suis plutôt impatient de t’entendre sur le sujet », dit Guillaume Soro. Et d’ajouter être convaincu que l’ancien ministre des Affaires étrangères rendrait sa démission. « Ô que je te connais fort bien ! Sans te parler et sans que tu m’en parles, je le savais en mon for intérieur », soutient-il.

S’agissant de sa démission de la présidence de l’Assemblée nationale, Guillaume Soro révèle avoir été déconseillé par Marcel Amon-Tanoh à cette époque. « Je me souviens encore que quand j’ai décidé de rendre ma démission de la présidence de l’Assemblée Nationale, tu m’avais, comme à ton habitude, suggéré de ne pas le faire. Mais cette fois-ci je ne t’ai pas écouté, je n’en pouvais mais, tout simplement. L’homme pour qui nous avions consenti tant de sacrifices, s’était éloigné de l’idéal commun », dénonce-t-il.

« Exactement un an après mon départ du perchoir dans les circonstances sur lesquelles il n’est nul besoin de revenir, j’avais l’intime conviction que ton sens de la dignité et ton sens de l’honneur te pousseraient à poser le même acte que moi. C’est pourquoi aujourd’hui, je suis fier de l’homme que j’ai connu et avec qui j’ai cheminé. Cet homme qui ne se laisse ni intimider, ni manipuler, tant son amour pour la Côte d’Ivoire est sincère et vrai », ajoute Guillaume Soro.

C’est le jeudi 19 mars que le ministre Marcel Amon-Tanoh a rendu sa démission du gouvernement ivoirien. Il est attribué à ce fidèle compagnon d’Alassane Ouattara des ambitions présidentielles, là où le RHDP son parti vient de choisir le Premier ministre Amadou Gon Coulibaly comme porte-étendard. L’intéressé lui-même n’en souffle mot.

A son aîné et ami, Guillaume Soro donne des conseils. « Aujourd’hui, te voilà dans l’arène politique, cher Marcel ! Je préfère te prévenir que la calomnie, la méchanceté te frapperont comme je l’ai été et le suis encore ! Mais pour être passé à la trappe avant toi, je ne puis que formuler ici même des vœux sincères de réussite. Il te faudra du courage, je sais que tu en as. Il te faudra de la résilience, je n’en doute point ! Mais surtout, il te faudra de la tolérance vis-à-vis de ceux qui, hier nous appelaient frères, mais qui dans la brume crépusculaire, nous en ont tant voulu, quelquefois mortellement ! Ceux-là mêmes qui, pour un plat de lentilles, sont prêts à faire prospérer les plus graves injustices dans notre pays ! », conclut Guillaume Soro.

Richard Yasseu

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